Philippe BURGER, en charge des activités capital humain au sein Deloitte et
Responsable mondial de l'activité Workforce Transformation
Les nouvelles règles du jeu dans un monde sans frontières.
Capital, crucial, primordial, le sujet des compétences est plus que jamais au cœur des préoccupations des organisations en cette année 2023. Selon la dernière étude Deloitte*,
pour 87 % des entreprises interrogées il est désormais nécessaire d’investir sur les compétences afin de rester compétitif sur le marché. Et il s’agit d’être proactif sur cette problématique car la moitié des tâches sera probablement automatisée d’ici 2025 selon une étude du World Economic Forum. Il faut donc « repenser la manière dont nous travaillons et la façon dont, en tant qu’être humain nous avons un impact » explique Philippe Burger. L’expert va même plus loin : « il est indispensable d’intégrer l’inclusion et l’équité dans l’ensemble de nos stratégies RH pour favoriser l’innovation et stimuler la performance ». Et pour cause, aujourd’hui les entreprises les plus diversifiées ont 25 % de chance supplémentaire de surperformer leurs pairs en matière de rentabilité ou de performance économique et financière.
Dans ce contexte, dans un monde en pleine transformation, où le travail se doit désormais d’être agile et fluide, Deloitte a identifié trois nouvelles règles du jeu pour espérer gagner la partie.
Adopter une mentalité de chercheur
« Sachant que les compétences vont petit à petit remplacer les emplois, les organisations doivent investir dans leur développement et simplifier les structures » selon Philippe Burger. Il ne s’agit pas d’abandonner cette vision d’une organisation pilotée à travers les emplois, mais bien de la faire évoluer. Et dans ce cadre, les entreprises doivent faire preuve de curiosité et d’ingéniosité à l’instar d’AT&T, ST Microeclectronics ou l’Oréal déjà engagés dans cette voie. Trois quarts des entreprises interrogées par Deloitte affirment tester une forme ou une autre de « skills based organization », près d’un quart d’entre elles s’y sont formellement engagées. Une évolution massive observée ces douze derniers mois, due notamment aux nouvelles technologies.
En effet, les révolutions technologiques autour du travail émergent désormais et permettent d’améliorer les performances individuelles et collectives. Chez BMW par exemple qui, avec Nvidia, a travaillé à améliorer la planification de ses outils de production.
Co-construire la relation
Dans ce cadre, il est indispensable de mutualiser les données disponibles sur les collaborateurs. L’idéal étant même que ces derniers puissent avoir accès à leurs informations sur leur carrière et les modifier d’eux-mêmes sur une plateforme, comme le font déjà certaines entreprises telles que Telstra groupe Australien de télécommunication. Cette co-construction se fait également par le biais des partages de savoir-faire, au sein des équipes, mais aussi dans l’ensemble de l’entreprise, voire au sein même de son écosystème élargi : c’est-à-dire l’organisation mais aussi ses partenaires en amont comme en aval. Pour Philippe Burger : « Il faut lever un certain nombre de délimitations pour exploiter davantage les compétences au sein d’un écosystème élargi, pour créer une main d’œuvre plus agile et plus flexible. » L’équipementier Faurecia par exemple, n’hésite pas à former ses sous-traitants à des approches de Lean-management, estimant que ses équipes seront alors meilleures sur le sujet.
Toute action ou décision doit être prise en conscience de l’impact humain qu’elle peut générer.
Le message des générations Y et Z, tel qu’a pu le recueillir l’étude Deloitte est clair : la moitié des répondants affirme avoir déjà fait pression sur les organisations pour faire évoluer leur approche en matière de durabilité, et un tiers d’entre eux se dit prêts à changer d’entreprise pour une organisation qui a un impact durable ou plus positif sur l’environnement.
Aussi, pour Philippe Burger : « Il faut désormais intégrer le sujet du risque humain dans le pilotage des principaux freins au développement des organisations. » Comme l’indique une étude Deloitte de février dernier, les deux priorités d’investissement des dirigeants sont en premier lieu, la transformation de leur business, et, en second lieu, leurs talents et leurs compétences. C’est ainsi que le groupe hôtelier Hilton, face à la pénurie de main d’œuvre, a élargi son champ de recrutement auprès de réfugiés, de victimes de traffics ou d’anciens détenus.
« Ce sont avec ces nouvelles règles de jeu que le futur des RH commence aujourd’hui » conclut Philippe Burger.